Relevé non-exhaustif des acteurs médias indépendants en Fédération Wallonie-Bruxelles.Cette étude a été effectuée en janvier et février 2020 à la demande de l’ABiPP, Association of Belgian independent Pure Players, qui souhaitait répertorier les différents acteurs francophones ayant lancé leur propre projet de média numérique, mieux connaître leur fonctionnement et leur réalité, mieux identifier leurs besoins et leurs souhaits. Ce faisant,l’ABiPP ambitionne de mettre en lumière l’émergence de nouveaux modèles économiques pour la presse en ligne.

LES PODCASTS

Le podcast commence doucement à s’installer dans les habitudes d’écoute des Belges. Ils sont aujourd’hui 16% à écouter des contenus audio en ligne. Contrairement à la France, où plusieurs sociétés de production de podcast (comme Binge Audio, Nouvelles écoutes ou Louie Media pour les plus connues), se sont lancées depuis 2018, suivies par des plateformes de diffusion (comme Majellan et Sybel), il n’existe en Belgique aucune société de production uniquement dédiée au podcast, même si des agences de création ont vu le jour récemment, à l’image de l’agence WeTellStories. Par contre, de nouvelles initiatives individuelles voient régulièrement le jour. Le marché est si prometteur que la plupart des médias (RTBF, L’Avenir, IPM…) ont lancé leurs propres podcasts internes dont certains rencontrent un franc succès, mais la RTBF reste actuellement le seul acteur à financer de la production podcast en externe (avec son appel à projet de podcast natif).Aujourd’hui, de nombreux podcasts voient encore le jour, de manière déstructurée, prevue finalement de la grande agilité du média et d’un succès de plus en plus croissant. De ce terreau fertile, le Brussels Podcast festival s’est d’ailleurs créé en 2019 pour faire découvrir la variété du podcast belge et international et favoriser les échanges. Dans cet univers foisonnant de podcasts en tous genres, quelques-uns sont nés d’initiatives de journalistes :

Les interviews d’Eric Cooper (https://soundcloud.com/radio-eric-cooper)

Podcast créé par le journaliste Eric Cooper en 2017 qui « essaie de faire découvrir des êtres humains intéressants ». A travers ses interviews, il fait la part belle aux passions et personnalités de personnes qui ont une activité ou une trajectoire inédite. De l’hôtesse de l’air au dernier majordome de Léopold III, il nous fait partager leur petite ou grande histoire.

Historique

Il y a trois ans, Eric Cooper a le projet de créer une web radio. Il prend donc des renseignements auprès de diverses structures pouvant lui apporter de l’aide pour monter son projet (incubateurs, AJP…). Les démarches n’aboutissent pas mais un confrère lui conseille de lancer plutôt un podcast, formule plus souple et plus en vogue. Il suit le conseil et lance donc son podcast début 2018.

Fonctionnement

Seul à la barre, Eric Cooper publie une interview par semaine. Cette régularité est très importante pour fidéliser son audience qu’il estime à 1500.000 personnes. Son podcast est hébergé sur Soundcloud principalement, une plateforme payante, mais utile car elle lui permet de bénéficier de nombreuses statistiques, mais est accessible également sur plusieurs autres plateformes. Par ailleurs, Eric Cooper a fait le choix de poster ses interviews et de les proposer en téléchargement libre afin de permettre à d’autres de les utiliser. Il les poste également sur une banque de données de programmes. Plusieurs radios régionales (en France mais aussi en Angleterre) reprennent ainsi ses interviews. Son programme est donc devenu une sorte d’émission radio qui fonctionne très bien. De ce fait, avec tous ces relais nationaux et internationaux, il estime que son audience est finalement bien plus large puisqu’elle ne tient pas compte de tous ces paramètres de rediffusions.

Réseaux sociaux

Pour faire la promotion de ses interviews, Eric Cooper utilise énormément les reseaux sociaux. LinkedIn, Facebook ,Instagram et Twitter sont pour lui d’importants pourvoyeurs de public. Le journaliste est inscrit sur de nombreux groupes spécifiques (comme Daily Face, sorte de Facebook pour artistes) sur lesquels il annonce systématiquement la sortie d’une nouvelle interview. Régulièrement, il poste aussi des liens vers d’anciennes interviews. A travers des courtes vidéos, de petits montages, il effectue un gros travail de promotion pour donner de la visibilité à son programme et faire en sorte qu’il soit largement écouté. Et cela paie puisqu’il reçoit beaucoup de retours positifs. Il estime à 800.000 personnes le potentiel de gens qui sont susceptibles de voir les informations qu’il poste. Mode de financement. Eric Cooper travaille seul, sans équipe, avec juste son logiciel de montage et son enregistreur.Il est employé à dans une radio liégeoise et n’a d’autre choix que de s’autofinancer. Il aimerait trouver une aide mais de démarches en démarches, il n’a vu que des portes se fermer devant lui à l’énoncé du mot « podcast ». Il n’est pas contre la publicité mais ne sait comment s’y prendre pour démarcher ou qui contacter. Aujourd’hui il se sent esseulé et très peu soutenu, ce qui est parfois décourageant et très frustrant.

Difficultés rencontrées

Eric Cooper en rencontre plusieurs :

– Le financement, comme évoqué plus haut. Eric Cooper dénonce le manque d’aide à la création pour les médias. « On nous ferme toutes les portes. Il faudrait que les structures censées aider prennent ce secteur aussi au sérieux, et nous soutiennent au même titre que quelqu’un qui veut ouvrir un magasin ou un restaurant ». Pour bénéficier d’aide, c’est vers des structures françaises qu’il se tourne, ce qu’il trouve anormal.

– Un certain dédain de la profession elle-même qui aurait tendance à considérer les podcasts comme un sous-genre, en tout cas pas du « noble journalisme ». Eric Cooper parle notamment de Prix pour lesquels il aurait voulu concourir avec son média et pour lesquels on lui rétorqué qu’il ne s’agissait pas de vrai journalisme. Il ne s’agit pas tant d’une difficulté que d’une frustration et il se dit indigné face à ce type d’attitude. Il indique ne pas se sentir soutenu par des organismes tels que l’AJP qu’il dit peu ouverts encore à des pure players comme le sien ou qui ont tendance en tout cas à privilégier plutôt des médias traditionnels. Il se félicite donc de la création de l’ABiPP qu’il estime nécessaire pour fédérer et aider des structures comme la sienne.

– Le podcast reste finalement assez peu connu ou estimé des gens. Il lui est donc difficile parfois de trouver des personnes pour ses interviews. La méfiance  prédomine encore quand il parle du podcast. « Les gens connaissent les grands medias traditionnels mais dès qu’on sort de ces formats classiques, ils sont vite suspicieux quand je les aborde pour une interview ». Soit les gens ne connaissent pas soit,quand il s’agit de personnalités connues, elles ne lui accordent pas d’intérêt en raison du manque de visibilité qu’elles lui attribuent. Eric Cooper doit souvent justifier, expliquer, afin de pouvoir décrocher une interview. Le fait de ne pas être connu est un frein.

Perspectives d’avenir

Pour Eric Cooper, l’avenir est dans la presse pure player. Il croit beaucoup en son média et veut s’accrocher malgré les écueils. Il aimerait voir naître un site ou une plateforme de podcasts. Le salut selon lui serait de « se mettre à plusieurs pour faire un site commun et être économiquement viable ». Pourquoi ne pas non plus collaborer avec des grands médias ? « La RTBF collabore bien avec des TV locales, pourquoi pas avec plusieurs podcasts ? Il ne faut pas nous voir comme des concurrents mais plutôt comme des entités complémentaires. Avec notre qualité de production de sons, nous pourrions alimenter en contenu des radios locales, des journaux » Dans cette optique, il se dit prêt à partager ses compétences et serait ravi de la mise sur pied d’un projet global visant à reconnaître,regrouper et légitimer les podcasts en Belgique.

Contacts :

Eric Cooper : cooper.eric.21@gmail.com

Site : https://ericcooperpress.eu/

Les Interviews d’Eric Cooper : https://soundcloud.com/radio-eric-cooper

ABiPP : https://www.abipp.be/